Che Guevara, Mambo, Trois minutes et les Noirs à Cuba Grande

Hotel Habana Libre

Maxette sur le balcon de l'hôtel "Habana Libre".

« Je pars à Cuba voir ma famille. » me dit la célèbre Cubaine-Suédoise Maria Llerena, la Reina de « Baby Salsa « en Suède. « Cuba Grande. Voyage avec Cœur, Cerveau et Considération. » est le slogan de l´ Albatros, l´agence qui organise ce voyage.

Cuba étant tout en bas de notre liste de voyages, nous décidons de la remonter et nous accrocher aux ailes de l´Albatros à la grande joie de la Reina accompagnée de son amie, la productrice et réalisatrice dont elle est la vedette parce que ces deux grandes dames appatiennent au programme télévisé pour enfants « Bolibompa » qui fit le plus grand succès dans l´histoire de la télévision suédoise : Mona Sjöström est aujourd´hui une peintre reconnue. Aussi chanteuse interprète d´Edith Piaf, Marlène Dietrich, etc. Elle évolue gaiement sur son inséparable canne où est incorporé une lampe qui l´éclaire et l´équilibre.

C´est ainsi que nous nous retrouvons ce mois de février 2014 pour la première fois à la République de Cuba Libre. Cet île habitée par les Indiens taïnos et les ciboneys fût découvert comme la Guadeloupe par Christophe Colomb. Fondée par Diego Velázquez de Cuéllar, colonisée par les Espagnols, rendu indépendante par Carlos Manuel de Céspedes et révolutionnée par le célèbre Fidel Alejandro Castro Ruz né le 13 août 1926, arrivé au pouvoir en 1958 -1959 après avoir renversé le régime dictatorial du général Fulgencio Batista. En pensant au chambardement de ma propre enfance de petite fille d´esclaves et de colons à la Guadeloupe sur les bancs de notre révolutionnaire Guadeloupéen Gérard Lauriette, je hisse mon drapeau coloré d´attention. Les lectures de mes jeunes années sur Cuba et sa révolution m´impressionnaient. Je n´ai retenu que le meilleur et refoulé tout le négatif. L´éducation est ma cause. Cuba est le foyer de plus de 47 universités avec un effectif total de plus de 400 000 étudiants. Les universités cubaines offrent un large éventail d’études visant à inclure les carrières techniques, la médecine, l’éducation, le droit, les finances, les sciences, l’économie et bien d´autres matières comm l´art. Selon un rapport de l'UNESCO datant de 2009, Cuba est de loin en Amérique latine le pays qui offre la meilleure éducation à l'ensemble de sa population.

Cuba ! Synonyme de notre amie Maria Llerena le noyau de la culture cubaine en Suède. Cuba ! Synonyme d´art, de musique, de danse, de Buena Vista Social Club, ... du soleil, de la mer, … À moi Cuba, son peuple, la gaieté …

Malgré l étreinte d une subtile appréhension, je pétille.

De l´aéroport de Varadéro, le car de luxe nous conduit à l´hôtel Habana Libre, anciennement le Hilton qui fût le siège de Fidel lors de sa Révolution. Du treizième étage, la vue sur la capitale qu´est la Havane quoique polluée et enfumée par les pétarades de l´essence des voitures pourtant pas nombreuses comparer à l´Europe, valait la montée.

Une parade en voitures américaines classées dans le patrimoine cubain, inaugure « Cuba Grande ». À la Havane, le Capitole, le Grand théâtre, le Musée de la Révolution, la Cathédrale... sont colossaux. Son incomparable vieille ville est un bijoux où s´immortalise le bar réputé Bodeguita del Medio, lieu de prédilection de Pablo Neruda, Gabriel Marcia Marquez, Salvador Allende... ces jouisseurs de l´authentique cocktail Mojito fait de rhum, de feuille de menthe, de sucre de canne de citron vert... arrosés d´eau gazeuse. Ce jour se termine par un spectacle au fameux « Buena Vista Social Club » où nous eûmes l´honneur de voir et d´entendre entre autres l´incomparable poète-slameuse Juana Bacallao qui approche sa centaine sur sa petite taille de force. J´ai bien dansé. Enchantés nous sommes mon mari Malte et moi. Me croyant au Nirvana, j´efface la méditation de ma routine.

« Cuba... quiero baila la salsa. » Mon enfance s´est passée au son du son, du cha cha cha, du mambo et de tous les sons qui composent la salsa. La sauce. L´histoire de la salsa qui a envahi le globe a différentes versions, mais la musique latine prend assûrement sa source à Cuba et ses racines dans l'Afrique de l'Ouest où non seulement la traite des esclaves prospérait mais où le Yoruba et d'autres populations ouest-africaines ont créé des rythmes pour invoquer leurs dieux. À ces rythmes ont été ajouté la guitare du flamenco des troubadours espagnols à Cuba. Isaac Oviedo, leader du groupe Santiga Casana fût l´un des inventeurs du son. Plus tard Emilio Orfe créé le style de danzón avec violon, violoncelle, flûte et percussions africaines.

« Avec son frère Cachao Lopez, Oreste Lopez a contribué à créer le nuevo ritmo à la fin des années 1930 en désarticulant la dernière partie du danzón. Pendant dix ans, cette musique n'a été dansée que par les Noirs. Et puis le chorégraphe cubain Rodney a créé une danse pour Las Mulatas de Fuego, un groupe de six danseuses. Quand elles sont parties au Mexique, le mambo a connu son apothéose. » raconte Bebo Valdès très bon ami de la Reina Maria Llerena et du joueur Guadeloupéen de gwoka et de congas en Suède Joseph Mocka.

Bebo Valdès est un grand pianiste et compositeur cubain. Pionnier du jazz afro-cubain, il est né à Quivicán dans la province de Mayabeque le 9 octobre 1918 et a gravé le premier album de jazz cubain en 1952 : « Con Poco Coco » qui a lancé le jazz latino. Petit-fils d'esclave par son père et espagnol par sa mère, Bebo Valdés est le père du pianiste Chucho Valdès et de Rickard Valdès, le joueur de congas dans le groupe de timba suédois, « Calle Real ».

Compositeur et chef d'orchestre reconnu, directeur du cabaret Tropicana à la Havane avant la révolution, Bebo Valdès accompagne entre autres le grand chanteur cubain Benny Moré. Il vécu au Mexique puis en Suède pendant quarante ans où il gagne sa vie dans l’anonymat, avec des cours de danse le jour et au piano-bar le soir. » Oui, un si grand musicien dans l´anonymat en Suède.

En 2001, il joue avec son fils Chucho dans le film de Fernando Trueba « Calle 54 » et enregistre « El arte del sabor » avec Cachao et Patato Valdés. Album qui reçoit un Grammy. En 2002, il accompagne le chanteur flamenco Diego el Cigala pour le disque Lágrimas negras. Un succès international également récompensé par un Grammy. En 2010, il compose la bande originale du film de Fernando Trueba et Javier Mariscal, « Chico et Rita ». Bebo est récemment décédé à Stockholm le 22 mars 2013.

Notons « Le barbare du mambo » qu´était Benny Moré, plus précisément le légendaire chanteur et compositeur cubain Maximiliano Bartolomé Moré Gutiérrez né en 1919 à Santa Isabel de Las Lajas à Cienfuegos, la ville natale de Maria. Il maitrisait tous les genres musicaux cubains. Après avoir été chanteur dans le « Conjunto Matamoros », il forme son orchestre « La Banda Gigante ». Génial improvisateur, sa particularité était entre autres de diriger son orchestre dos aux musiciens, face au public. Il meurt en 1963 à La Havane. Écoutez « Guantanamò » ! Tous les ans en septembre, a lieu un festival cubain qui porte son nom à Cienfuegos, la ville natale de Maria Llerena.

Xavier Cugat, un génie du violon né en Espagne et élevé à Cuba, dans un mixage unique de musique afro-cubaine et de flamenco popularisa aussi le mambo, dans les années 1940 en composant la musique des films de Charlie Chaplin dont City Lights. Avec son groupe, "Cugat et les Gigolos" il composa un doux mélange latin très prisé de Busby Berkeley et Fred Astaire.

C´est ainsi que de Louis Armstrong, Jelly Roll Morton, Dizzy Gillespie dont le batteur était le Cubain Chano Pozo, Charlie "Bird" Parker, Stan Getz à Cal Tjader, enn ajoutant Sam Cooke, The Diamonds, Johnny Otis, Elvis Presley, Bo Diddley et Nat King Cole, tous les musiciens Américains ont commencé à insérer dans leur propre musique des rythmes latins et ont contribué à populariser la musique latine contenant des éléments de la musique cubaine. En mixant les paroles en anglais et le rock and roll avec son patrimoine musical cubain Gloria Estefan fait encore un tabac.

Bien avant Gloria, en 1930, la rumba de Don Aspiazu et l'industrie cinématographique avec Desi Arnaz et son orchestre envoûtèrent les anglo-américains au son de "Babalu" et "Cumbanchero". Puis arrivèrent l´expert du mambo Tito Puentes le Portoricain, et les rois de la salsa Willy Colon, Ray Baretto, Johnny Pacheco et Úrsula Hilaria Celia de la Caridad Cruz Alfonso de la Santísima Trinidad, surnommée entre autres La Reina de la Salsa et La Guarachera de Cuba. Bien sûr, je présente Celia Cruz reconnue à la radio cubaine à l´âge 7 ans. Son premier enregistrement fût en 1951. Née le 21 octobre 1925 à la Havanne, elle est la chanteuse de l´ensemble cubain « La Sonora Matancera ». Chouchou de toute l'Amérique latine son mot fétiche ¡Azúcar! (du sucre) est repris dans la sauce salsa. En 1960, à la révolution cubaine, Celia émigre aux États-Unis et devient américaine. En 1966, elle s´associe avec Tito Puente pour huit albums dont « Guantanamera » et « Bemba colorá » en 1967 et « Aquarius / Let the sunshine » en 1969. En 1974, elle reçoit le disque d´or avec Johnny Pacheco pour l'album "Celia y Johnny". En compagnie de Fania All Stars, elle fera une tournée internationale. En 2000, à Boston, nous eûmes l´honneur Malte et moi, d´assister à son concert. En juillet 2003, elle succombe à une tumeur cérébrale chez elle à Fort Lee en New Jersey.

Une vie qui me touche beaucoup est celle du roi de la Salsa, le talentueux Hector Lavoe de Porto Rico, « El Cantante ». Un grand musicien moins connu du monde, et l´un des véritables père de la salsa au début des années 1960, selon le spécialiste de la salsa Luis Alba, est le batteur aveugle Cubain Arsenio Rodriguez.

Tout simplement la musique cubaine est le résultat de la fusion entre la percussion africaine et la guitare espagnole, enrichie par d’autres instruments musicaux arrivés de l’Amérique du Sud tels les « claves » (petits bâtons en bois) et les maracas, faites à partir des arbres « güiras ». La pulsation musicale est omniprésente sous toutes ses formes, dans toutes les espaces, les restaurants, les bars, dans la rue et tous les coeurs à Cuba. Je jubile.

L´invitation du lendemain de Maria Llerena chez ses amis et sa famille dans la banlieue de la Havane nous enchante. Elle tenait à ce que nous la suivions en car local lors de ses visites dans le véritable Cuba où elle distribuait le contenu de ses valises et des nôtres qu´elle avait rempli et où les queues pour les transports se serpentent en kilomètres. Nous sommes chaudement et gnéreusement reçus. Cependant, alors qu´à l´hôtel tout est luxuriant et souriant, l´abattement résigné des voyageurs dans les cars bondés me stupéfia. Les yeux rougis par la désolation, ils semblent tous porter un lourd fardeau.

Trois minutes

Trois minutes

Hors du cercle touristique de rêve, tassée entre les Cubains coincés en sardines nageant dans une sudation de détresse pour un voyage de deux heures dans ces cars, un circuit qui nous aurait pris à peine 15 minutes en taxi, un affreux déboire menaçait l´allégresse de mon expectation. Je connais la pauvreté des Caraïbes. Haïti, Dominique, la République Dominicaine ne sont pas loin mais Cuba... mon idéal... je ne m´imaginais pas. Après avoir vécu deux mois à Rio au Brésil, à quoi m´atttendais-je ? La désillusion du bébé qui naît avec l´attente d´être choyé et dorloté mais qui reçoit une baffe à sa naissance paw ! m´estourbit. Mon cerveau, cet organe de la vie psychique et des facultés intellectuelles s´étrique. Dans une danse de hip hop au ralenti nous arrivons Malte et moi exactement trois minutes en retard. Le groupe de Suédois en direction pour le show Tropicana dans le car de luxe avec air conditonné qui devait nous y conduire, rage. Détail historique car en conjuration au voile sombre de cette randonnée qui m´a décillé, je m´appliquai à me parer pour la soirée. Lorsque j´apparus parée de mes habits traditionnels madras créoles comme un paon, trois minutes après la "cañonazo (la cérémonie quotidienne du tir du canon exactement à vint-et-une heures au cœur de la forteresse San Carlos de la Cabaña qui domine le port de la Havane) le guide suédois que je voulais sympathique, un très jeune homme blond qui attendait pour nous lire les nouvelles suédoises (???) m´aborde brusquement et me fait une leçon de la ponctualité suédoise avec tous ses droits sur un ton dictatorial, devant sa troupe de supporters que sont les Suédois aboyant en arrière plan. Un sujet en passant nous gronde carrément : « Pour qui vous prenez vous pour arriver les derniers ? Vous vous croyez mieux que nous ?» Encouragé par cet intimidation le guide se redresse sur sa petite taille et se targue de mettre de l´ordre. Je ne puis m´empêcher de me demander si ma condition ontonlogique lui a facilité son approche car lui n´osa pas s´adresser à mon époux suédois. « La Suède dans son temps » est la devise suédoise... à Cuba. Malte mon mari, habitué à la loi de Jante, un code de conduite profondément ancré dans les pays nordiques dont le premier « Tu ne dois pas croire que tu es quelqu'un de spécial ! », n´est pas touché. Fragilisée par la pénurie que je viens de découvrir, j´ai honte de me sentir la proie de chiens enragés qui me rappellent ceux qui étaient dressés à chasser et déchiqueter les nègres marrons pour... 3 minutes de fuite ? J´ai analysé le sentiment de la honte. Elle dévoile le déshonneur. Le déshonneur est une perception émotionnelle de l’ego et du mental au paroxysme. Un état qui débride la rage, mais ce déchaînement grâce à Dieu révèle la contrition qui guide à l’éveil et la résurrection de la dignité.

En Suède, en Europe, ce corps de souffrance de petite fille d´esclaves, probablement désactivé par la méditation quotidienne, j´efface souvent le manque d´équité et la bêtise avec une acceptation digne de « L´idiot » de Fiodor Dostoïevski, ignorant le plus souvent royalement avec humour les attitudes racistes. Mes îles la Guadeloupe et la Martinique jumelées à Cuba ont les mêmes courants telluriques, le même passé de colonialisme et d´esclavagisme c´est-à-dire que la plupart de nos ancêtres étaient cloués dans les câles de bateau et minés. Plus exactement, les négriers fourraient dans le trou de leur derrière, une charge d'explosif enveloppée de métal, muni d'un détonateur pour en régler l'explosion au moindre mouvement de révolte. Relisez si vous n´avez pas réalisé. Un passé qui devrait diriger notre regard dans la même direction. Ce corps blessé ensommeillé étant fragile, sous l´attaque verbale et silencieuse telle une tigresse encagée, il surgit, se dresse et mord ses fers. J´ai déjà eu cette réaction à la Guadeloupe et à la Martinique où pullulent les racistes de toutes couleurs. Ce besoin viscéral de réagir en cet instant contre ce que je considère comme du racisme c´est-à-dire une injustice, un irrespect, un manque de cœur, de considération, de psychologie me tenaille les entrailles parce que... écoutez bien ! Parce qu´il était bien recommandé noir sur blanc par l´agence « Åker man till Kuba ska man försöka anpassa sig efter det lokala tempot och på det stora hela ta lite lättare på saker och ting eftersom allt tar sin tid här. … En portion tolerans och gott humör är därför viktigt att ta med sig, ... » Traduction : « Lorsqu´on va à Cuba, on doit essayer de s'adapter à la cadence locale et dans l'ensemble, prendre plus facilement les choses parce que tout prend son temps ici. … Il est donc important de prendre avec soi une portion de tolérance et de bonne humeur, ...  »

Tenir sa parole est aussi une devise nordique à ce que je sache. Nous nous sommes passés volontiers du show Tropicana... interdit d´ailleurs aux spectateurs Cubains par l´apartheid-touristique. Et le groupe s´est plaint d´avoir attendu une heure avant le spectacle en sirotant des mohitos.

« Ce ne sont pas les trois minutes. » me rassure une dame du groupe qui me veut du bien. « La majorité de nous sommes des retraités. Tu n´es pas un rat gris. Tu arrives haut en couleurs vitales et rieuse. Quand on est originale, on doit s´attendre à des coups bas. C´est la vie. « 

Plus longtemps on vit, plus près de la mort on approche. Elevée à la Guadeloupe au temps où la vieillesse ne se cachait pas derrière senior ou troisième âge mais signifiait avoir le temps de partager avec les plus jeunes sa sagesse, sa tendresse, sa générosité, son cœur... son temps... en un mot son expérience, cette malveillance me déroute. Bon. C´est vrai que j´aime rire et faire rire. Déjà que mon sourire s´entend. Je ris beaucoup, souvent et sans raison. C´est mon antidépresseur et mon antidouleur. Mais elle a raison la gentille dame dans un groupe il faut s´attendre à tout, surtout aux mornes, aux moroses, aux ténébreux, aux neurasthéniques... Je ne ris plus. Trop tard. Tombée dans le piège, la maîtrise en vadrouille, un flot de courroux s´annonce.

Sur les citations encadrées de facebook, j´ai lu « Il ne faut jamais laisser un pet à l´intérieur, autrement il vous monte la colonne vertébral et vous arrive au cerveau et c´est à parti de là que naissent les idées de merde. » Tel un furoncle enflé à péter, j´ai vomi mon pus au guide et sortis en trombe du car. Cherchant plutôt à ne pas perdre la face, il vint dans notre chambre professionnellement s´excuser et reconnaît avoir été manipulé et influencé à statuer un exemple par quelques uns des siens outrés que j´arrive toujours rayonnante, car dit-il « Trois minutes de retard n´est rien car nous avons toujours un marginal de dix minutes. Et c´est vrai que tu es d´une originalité qui dérange le suédois conventionnel. Et ils ne sont pas tous contre toi, seulement quelques uns. Certains m´ont dit te trouver très élégante. » Belle consolation. Toutefois ce baume sur l´ego m´autorise à rageusement ventiler et le déculpabiliser. Mais désormais, cette manie de généraliser veut que je me méfie de lui et de presque tout le groupe.

-Tu as une attitude trop sûre de toi. Quand ton intensité crée des rides, les gens de ton entourage qui sont sûrs d´eux se vitalisent par ta présence. Les autres se sentent irrités. Tout le monde ne peut pas t´aimer. » me sermonne avec humour Myriam avertie par le guide. Belle Cubaine blanche, vive et alerte, elle est responsable de l´agence de Cuba en collaboration avec Albatros. Intelligente et très attentive à tout ce qui se passe sur son territoire, elle déploie tout son charme pour faire taire l´orage en moi qui annonce l´ouragan que provoque ce que je ressens comme du racisme : un chapitre que je crois toujours avoir enterré.

« Crois bien Myriam que comme une mouche qui se noie dans un verre de lait je ne cherche pas être aimée, mais plutôt à aimer le lait dans lequel je me noie. Une sacrée mission. La plupart des gens ne s´aiment pas, pourquoi m´aimeraient-ils ? Et si tout le monde m´aimait, cela signifierait que je ne suis pas moi-même et ne dis pas ce que je pense. Je ne suis pas gentille de la passivité indolore mais je suis correcte avec tout le monde. Tout ce que je demande est que l´on soit correcte à mon égard.  » est ma réponse quelque peu apaisée par sa chaude présence. « Pour le moment l´oiseau vorace qu´est Albatros a englouti ma bonne humeur. « 

- Ce n´est pas Albatros. Nous faisons toujours ce que nous pouvons. » dit-elle.

« Mon problème pour le moment est que ma joie s´est éteinte. Je suis fâchée. Ce voyage nous coûte une fortune. Voir Cuba était un rêve mais je n´ai pas payé pour me faire inutilement et injustement admonestée pour trois minutes de retard dans un marginal de dix minutes uniquement parce que je suis noire, originale et chic. Je suis déstabilisée et ne veux plus continuer. Je suis révoltée à Cuba Libre. » Elle sourit à son tour, me dit qu´elle aime bien m´entendre dire Cuba Libre et me prie gentiment de continuer le voyage en me promettant que je ne regretterais pas.

-Tu es trop sensible. Oublie cet incident ! me dit Maria. Fais comme moi, ce que disent les gens m´est bien égal. En fait ils sont gentils les Suédois. Ne prends pas cela à cœur ! Jouis de tes vacances. »

Elle a raison. J´écoute toujours attentivement la Reina. Ses quarante-six ans en Suède et ses activités culturelles lui confère de l´expérience. Sa sincérité attise ma bonne humeur. Consciente je suis de faire d´une mouche un éléphant. Je devrais faire semblant de rien. Je dois retrouver ma présence. La seule solution est d´accepter ce qui se passe. Lâcher prise. Je dois taire cette sourde colère.

« Arrête Maxette ! Oublie cela ! Ce n´est pas grave. Respire ! » est ma répétition sous la fermeture éclair qui zip mes lèvres. Un crissement de dents qui me fait penser à la craie contre le tableau vire ces affirmations. Le malaise, semblable à une sangsue, se ventouse au dialogue défensif amplifiant la sensation de désenchantement. Je ne me plains heureusement pas suffisamment pour ne pas être responsable des sentiments que suscitent la redoutable pensée. Ma mémoire émotionnelle est vivace. Je me remémore soudain n´avoir jamais raison et ne tiens pas à l´avoir. Je veux la Paix. Pas raison. Plutôt encline à me révolutionner afin de percevoir les situations sous un autre angle à dessein de pardonner, je m´emtête à ne pas oublier. L´esprit étant sensibilité et mémoire je refuse de le perdre. Je l´épouse chaque instant pour le meilleur et pour le pire. Seulement, la révolution est comme le ménage, avant que tout brille, il faut soulever la poussière. J´en avale, j´en ai plein les yeux, j´étouffe mes larmes. « L'amertume est comme le cancer. Il ronge l'hôte. Mais la colère est comme le feu. Il brûle tout propre. » confirme mon inspiratrice de sagesse qu´est Maya Angelou que Maria m´a raconté avoir rencontré. Je ne sais pas ce que c´est l´amertume mais le don de l´écriture sait asphyxier ma colère.

Un touriste est une personne qui voyage pour son plaisir . Je vous avoue tout de suite que ces trois minutes augmentées par la constatation de la pauvreté et la misère cubaines nattées de la surabondance jusqu´au gaspillage du milieu touristique où je paradais, m´a creusé une abysse de confusion que je travaille ici et maintenant à combler de compassion. Cette traversée de Cuba Grande a sérieusement chamboulé ma zone de confort endormie dans le berceau de la Négresse-Solitude. Empathique, au fond des regards hagards en détresse de ces Cubains auxquels je ne pus m´empêcher de m´ identifier, je fus contrainte de dépouillement. Nue devant ces murs humains de lamentations, cette confession d´être gueuse fit jaillir les sanglots en hoquets. Les deux mains cimentées sur le visage, je m´accusai moi, Femme Noire acculturée par une société européenne raciste, même à Cuba Libre, de souvent mendier aux Suédois de toutes couleurs ce qu´ils n´ont pas eux-mêmes : de l´attention, de la compréhension, de la considération, du cœur, du cerveau, ... du temps, 3 minutes (à des vacanciers)...

« L´Albatros » le poème de Charles Baudelaire dans « Les Fleurs du mal » chanté par Léo Ferré passe en nuage. Pour le poète cet oiseau est un symbole de souffrance qui représente la dualité de l'homme : l´âme et le corps.


« Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher. »

Harassée après une nuit blanche, de notre chambre d´hôtel dans les bras de mon mari inquiet, je fixai le soleil se lever au-dessus des toits en ruine de la Havane. Trop d´émotions nuisent l´harmonie.

Depuis, ma présence effacée, ma joie étant une tristesse dévêtue, je la fagote de confusion et d´insurrection. Dorénavant, afin de me distraire, je m´amuse à compter tous les retardaires. Armée de sa canne lumineuse, Mona en prima donna arrive la dernière en interprétant « Carmen » se donnant à cœur joie au-delà du temps.

« L´amour, l´amour... »

Je ne peux m´empêcher de rire.

-Si tu veux être en retard, procure toi une canne, me dit un Suédois du groupe sans rire. Je le flagelle du regard et le fustige verbalement. Le guide blond veille.

Je surprend une conversation entre un couple :

-Elle exagère de faire une histoire d´une observation. Nous, nous avons oublié et passé à autre chose. Et puis, c´est vrai qu´elle est arrivée 3 minutes en retard. »

-Elle devrait apprendre à tolérer les critiques. Elle n´est pas mieux que nous. »

Je fais cette fois la sourde et Mona qui se dit sourde, continue sa rengaine :

«L'amour, l´amour, l´amour, l´amour
L'amour est enfant de bohême
Il n'a jamais jamais connu de loi
Si tu ne m'aimes pas je t'aime
Et si je t'aime prends garde à toi
Prends garde à toi
Si tu ne m'aimes pas, si tu ne m'aimes pas je t'aime
Prends garde à toi …
Mais si je t'aime, si je t'aime prends garde à toi»"

J´épie cette fermentation touristique qui se rassasit dans le gaspillage de l´opulence, en contraste des mendiants qui passent tout leur temps à combiner des stratégies de système D, à dessein d´extraire un peso, une savonnette, un stylo ou un crayon de ces mêmes gens qui monnayent les minutes. Tels ces petits cylindres sur lesquels sont inscrits les numéros de loterie qui dansent dans la bulle à la télévision, des « ismes » ignés de révolution virevoltent dans ce séisme mental qui m´a ravit la sécurité : Colonialisme. Capitalisme. Impérialisme. Mercantilisme. Consumérisme. ... Ces doctrines me branchent sur le danger du racisme que sont le crétinisme. L´esclavagisme. L´extrémisme. L´egocentrisme. L´intégrisme. Le schisme. L´obscurantisme. L´idiotisme. L´immoralisme. …

Le lieu de la révolution

Le lieu de la révolution

Mon regard se décolle de la fenêtre du car pour se poser sur notre Célia Cruz : La Llerena. Première Cubaine arrivée en Suède en 1966, née à Cienfuegos, chanteuse, joueuse de congas, danseuse, conteuse, conférencière et pédagogue, La Reina laisse aller sa peine. Tout au long de nos pérégrinations, elle conte à la ronde la cruelle pauvreté de son enfance sous le règne du dictateur Fulgencio Batista et les inutiles obligations sous celui de Fidel, telle celle d´assister à toutes les manifestations sous peine de sanction, jusqu´au manque de soins et de médicaments pour le cancer qu´elle apportait à ce moment à plusieurs membres de sa famille qui souffrent de cet épidémie mondiale sans les moyens de se soigner. Ses souvenances l´alarme jusqu´aux larmes. Sa panique de nous accompagner sur la Place de la Révolution l´ébranle.

Il y a une différence entre vœu de pauvreté défini comme la volonté de renoncer aux aux possessions , afin d'être plus disponible pour se consacrer à sa foi et la pauvreté qui caractérise la situation d'une personne dont le manque de nourriture, d'eau potable, de vêtements, de logement, soient les ressources vitales qui lui permettent de vivre dignement dans une société. Additionner le manque d’accès à l’éducation, l’exercice d’une activité qui la valorise, le respect des autres et le développement personnel. Et puis, il y a la pauvreté et la misère.

Dans ses recherches de la différence entre la pauvreté et la misère, le sociologue Eugène Buret remarqua que «  Chez tous les peuples, il y a des pauvres ; mais quelle différence entre les conditions des individus qu´on désigne sous ce nom ! Pour ne pas sortir de notre époque, quelle énorme distance sépare le paysan d´Irlande du pauvre d´Angeleterre et de l´indigent en France ! La pauvreté de l´Anglais sera pour l´Irlandais le comble de l´opulence. »

Par le mot misère, il désigne le dénûment qui réclame le secours de la charité publique ou privé. «  L´homme appartiendra à la misère lorsqu´il ne pourra plus supporter seul sa pauvreté et celle des siens si personne ne vient à son secours. La pauvreté n´a pas de mesure fixe : on ne peut pas déterminer invariablement où elle finit et où elle commence. » En un mot, il y a des situations qu´on refoule en vue de survie, mais la pauvreté, elle, ne s´oublie pas.

« Était-ce mieux avant la Révolution de Fidel ? » lui demandai-je.

-Non, répond-elle. La différence entre les pauvres et les riches était plus grande. Aujourd´hui, c´est un petit groupe de blancs qui dirigent le pays où les noirs n´ont pas de place. L´inégalité entre les afro-cubains et les cubains blancs est indiscutable. Remarque bien qu´il y a très peu de noirs dans le service du tourisme. La révolution était censée abolir les frontières raciales pour les noirs. Tu as vu tous ces mendiants où la majorité est noire ? Et compte le pourcentage des employés noirs à ton passage dans les hôtels ! »

Je l´ai remarqué mais en Suède, le racisme étant tabou, j´ai tant l´habitude de réprimer ces constatations... enfin.

Une Suédoise intervient :

- Du racisme à Cuba ? Cuba est comme en Suède. Il n´y a pas de racisme. De la xénophobie oui ! Mais pas de racisme chez nous. J´ai lu sur internet le recensement officiel cubain de 2012. Les Cubains blancs sont 64%, les noirs 9 % et les mulâtres 27%.

Focalisée sur ses souvenirs, Maria n´a pas entendu. Un mascaret d´informations bridées giclent des archives classées dans ma mémoire dénégatoire.

J´ai envie tout à coup d´étaler le savoir que selon Ronaldo Menéndez, l´auteur du « Défis de la problématique raciale à Cuba », « … Plus de 60% des 11,2 millions de Cubains sont noirs ou mulâtres, mais selon le recensement, 65% des Cubains se sont déclarés blancs. « 

Mais zip ! Je me tais, puisqu´à Cuba et pas seulement à Cuba « ... une recherche effectuée par le Centre d’Anthropologie de l’Académie des Sciences en 1995 dit que 95% des blancs considèrent que les noirs sont moins intelligents ; 65% croient que les noirs n’ont pas les mêmes valeurs ni la même décence.» 

Je n´ose pas non plus ajouter les études de de Morales Dominguez qui affirme qu´ » A l’Université de La Havane comme dans les Centres d’Education Supérieure, le « thème racial » est pratiquement absent et des curriculum et des plans d’étude, et c’est à peine s’il occupe un petit espace dans le cadre des activités de recherche.  
Beaucoup de recherches qui, jusqu’à il y a peu, se faisaient sur le thème restaient en général dans les tiroirs en attente de publication. Il est important de reconnaître que l’ignorance est un des mécanismes sociaux les plus dangereux pour l’auto-reproduction du racisme, des préjugés raciaux et la discrimination raciale. Si le thème est méconnu, on en débat à peine et on ne s’en occupe pas dans le système éducatif et la recherche scientifique. Comment l’aborder pour le surmonter ? 
L’immense majorité des recherches les plus approfondies sur le « thème racial » à Cuba pendant les cinquante dernières années n’ont pas été le produit des scientifiques ou des auteurs vivant dans l’île. 
 Donc un thème si important de la réalité cubaine contemporaine n’est pas abordé de manière suffisante par nos intellectuels et nos scientifiques. 
 En conséquence de quoi nous avons abandonné le thème avec les conséquences négatives que cela peut avoir pour nous. Nous n’aimons pas partager nos thèmes avec des personnes de latitudes différentes, mais c’est une erreur d’éviter de les traiter nous-mêmes. Surtout quand nous connaissons l’effort qui est fait hors de chez nous par les ennemis de la révolution pour écrire notre histoire en marge de nos réalités et avec des propos en marge de nôtres. »

C´est écrit.

Toujours d´après « Défis de la problématique raciale à Cuba »  « A Cuba actuellement, le racisme est en train de renaître parce que persistent des stéréotypes raciaux négatifs et d’autres conditions économiques, sociales et idéologiques qui lui sont favorables. D’où l’urgence de l’affronter avec force. »

Pendant 3 minutes, je me chante en guajira : « Pas seulement à Cuba. Pas seulement à Cuba. Pas seulement à Cuba. «  Idem au Brésil, en Suède... dans toutes les îles néocolonisées et le monde entier. Le racisme est une maladie mentale donc inconsciente, bien établi dans l´agressivité-passive sous le couvert d´être humain. « Sale race que l´humaine » a écrit le journaliste français en Suède Paul Pouron.

La vérité n´est pas populaire, mais il est bon de savoir qu´elle est comme l´huile dans l´eau. Elle remonte toujours en surface et parfois comme un polluant tsunami.

Zip ! Je ne leur dis pas que j´ai lu « Las Bestias » de Ronaldo Menéndez. L´histoire de Claudio Cañizares, professeur dans l’enseignement secondaire, et la haine qu´il voue à ses voisins afro- cubains du quartier havanais de Buenavista. « Le racisme à Cuba existe, mais il est dit « culturel », c’est-à-dire qu’il n’empêche pas le mélange. » Quelle consolation ! J´interromps ce raz marée de donnée ainsi que la voix du guide de reporter de guerre passionnément informative et prête oreille à La Reina :

-Le boycott du pays par USA n´arrange rien. Toutefois beaucoup de choses sont importées de la Chine et d´autres pays. «  Et puis, ajoute-t-elle, « Où est l´évolution lorsqu´un mèdecin en 2014 gagne 14 € par mois et doit soutirer des sous aux pauvres malades pour gagner sa vie ? C´est cela la réalité à Cuba. » je remarque que parallèlement le guide a dit la même chose.

Je réplique à Maria qu´en 1998 Fidel a reçu la Médaille d'or de la Santé pour Tous de l'Organisation mondiale de la santé. Que Cuba forme des médecins. Et même qu´en 1999, le gouvernement a créé l'École latino-américaine de médecine qui a accueilli depuis sa création 7 248 étudiants venus de 45 pays. Et encore que l'industrie pharmaceutique cubaine est l'une des six au monde produisant une protéine nommée interferon. Elle produit aussi entre autre, des modulateurs immunologiques, antihypertenseur, hypocholestérolémiant et même des médicaments anticancéreux.

Maria retrousse ses lèvres en me soufflant le prix faramineux payé en Suède pour les médicaments du cancer emmenés aux membres de sa famille pauvre de tout.

Je ne sais que penser. L´éducation est ma cause. J´ai admiré le courage de Fidel et El Che de vouloir enrichir et éduquer les pauvres. Une belle parole de Fidel qui a révolutionné ma conscience émerge : "... La qualité de la vie réside dans la connaissance, dans la culture. Les valeurs sont ce qui constitue une véritable qualité de vie, la qualité suprême de la vie, même au-dessus la nourriture, des abris et des vêtements. " Mais depuis, j´ai aussi expérimenté qu´un ventre vide ne tient pas debout. Je souligne à Maria que selon le Programme des Nations Unies pour le Développement, Cuba se situe au troisième rang mondial avec un taux d'alphabétisation de 99,8 %, à égalité avec l'Estonie et devant les États-Unis qui ont 93,3 %. Donc Cuba est l´île la plus instruite des îles Caraïbes.

- Après la Révolution, nous dit-elle, les écoles privées et les universités ont été c´est vrai nationalisés et tous y ont accès. Mais les écoles publiques étaient gratuites même au temps de Baptista. Seulement, beaucoup d´enfants n´allaient pas à l´école puisqu´ils devaient travailler pour manger justement parce qu´ ils étaient pauvres. » « Aujourd´hui, tu as vu tous ces mendiants de tous les âges dans la rue ? Ils sont le plus souvent noirs et affamés. Comment peut-on étudier quans on a faim ? »

Un mouche passe. J´évoque un discours lu d´El Che tenu à Las Villas: « Les murs du système éducatif doivent tomber. L´éducation ne devrait pas être un privilège, de sorte que seulement les enfants de ceux qui ont de l'argent peuvent étudier. L'éducation doit être le pain quotidien du peuple de Cuba. »

Éducation : Mise en œuvre des moyens propres à assurer la formation et le développement d'un être humain. Tous les Cubains sont de belles personnes quelques soient leur mélange. Je suis remarquée et attise leur curiosité. J´ai envie de les embrasser tous, de rire avec eux, de danser, de chanter... Comme partout le pays vit de pourboires et peu de salaires. À La Havane, je constate que nécessité oblige, un sourire ou une attention quémande souvent un peso. Je réponds rarement à la mendicité, car par expérience, ressentir la déception du mendiant de ne pas recevoir suffisamment, quelque soit la somme ou le don me culpabilise. Mais cette fois gênée, je tends deci-delà un cuc, deux, trois... et en effet leur désappointement m´ahonte. Ce sentiment d´impuissance jumelé au stress des 3 minutes m´agresse. Les plus âgés ne craignent pas de dire merci. Leur humilité due à la réprime de leur orgueil m´attriste. Je fouille dans mon sac d´humour. Euréka ! Mon parler espagnol limité leur arrache des sourires, puis des rires, câlins de mes sens. Je les distrais en baragouinant autant que possible. Leur gentillesse, leur spontanéité, et leur générosité semblent être refreinées par leur désespoir de survivre. Et « l'habitude du désespoir est pire que le désespoir lui-même. » disait Camus. Je le connais le désespoir. Mon authentique Joie est extraite tel un diamant de la gadoue, de cet abysse ténèbreuse qui vous renie votre foi, votre puissance, votre existence. Je le connais le désespoir. Il éteint parfois la flamme vitale dans le tunnel de détresse. Je le connais le désespoir. Il vous effruite de toute dignité. Je connais cette affliction actuelle qui sournoisement sévit sur tout le globe en crise d´avoir et pas assez d´être. Mon espérance se puise dans la persuasion irrationnelle que la vraie crise n´est pas sociale, politique ou économique. Elle est la crise de conscience, d´une incapacité à ressentir directement notre vraie nature et à reconnaitre cette nature en chacun de nous et en toutes choses. Le manque d´empathie qui me blâme pour ces impardonnables 3 minutes de retard.

Goudjougoudjougoudjougoudjou ! Les raisins de la colère en ébullition vinassière me vrille les tympans. « La guerre est là, dans le fond des coeurs ... » déclamait le poète Cubain José Marti. Malte, mon mari suit le guide, écoute. Le guide se démène tout content de partager ses connaissances de Cuba. Son assistante, une ravissante et gentille brunette Cubaine Leina est discrètement muselée, mais très vigilante en bergère à la sérénité du groupe. Sa présence a l´art de me rassurer.

Cuba Grande

Cuba Grande

Revenons à nos moutons. La mañana, au son du son, s´ouvre la porte de Cuba Grande divisée en 15 provinces : Holguín, Santiago de Cuba, Villa Clara, Granma, Pinar del Rio, Matanzas, Guantanamo, Las Tunas, Sancti Spíritus, Ciego de Avilla, Camagüey, Cienfuegos, La Havane et depuis le 1er janvier 2011, Artemisa et Mayabeque, et une spéciale municipalité L´Île de la Jeunesse.

Nous quittons la capitale, roulons 156 km à l'ouest et arrivons à Pinar del Río peuplée de 140 000 habitant, la plus grande zone de culture de tabac du pays avec 80 % de la production nationale. Surprise : cette ville parfumée est jumelée à Sainte Anne à la Martinique... Après avoir fait un mystérieux voyage souterrain en canot à moteur sur une eau argentée parmi des stalagtites en terre tombant des voûtes qu´utilisaient les Indiens, nous humons les feuilles de tabac récoltées et séchées dans des cabanes. « C´est pour éliminer plus de 90 % de leur eau » nous dit-on.

-Les tabacs en feuilles sont classés selon leur variété ou leur mode de séchage. Puis on les stocke pour favoriser la volatilisation de la nicotine et de l'ammoniac. »

« Pour qui sonne le glas » ? Pour Ernest Hemingway bien sûr. Bus comme du petit lait dans les bars qui exhibent les traces de «  Le vieil homme et la mer », les cocktails « Hemingway » font un tabac chez les touristes qui cherchent l´ébriétété de l´auteur de « Le soleil se lève aussi ». El Morro, son immense propriété où son bateau flotte dans son parc, sa machine à écrire, ses photos, ses effigies, son regard sur la mer, tous sont des reliques vénérées. Le prix Nobel de littérature en 1952, l´eprit du grand ami de Fidel, est bien présent partout à Cuba. Il nous prête ses ailes et nous nous envolons à 762 km de La Havane à Santiago de Cuba, la deuxième ville du pays jumelée depuis 1996 Santiago de Cuba au Lamentin à la Martinique.

Nous atterissons à « La Tierra caliente » (la Terre chaude), la ville où se déroule le plus célèbre de Cuba en fin juillet . Titrée « berceau de la Révolution », fondée en 1514 par Diego Velázquez de Cuéllar, elle abrita la Bataille hispano-américaine qui mena Cuba vers son indépendance. Santiago de Cuba est aussi la source de l´échec de l´attaque manquée sur la caserne Moncada le 26 juillet 1953 de Fidel qui lui valut sa fameuse défense : « L’Histoire m’acquittera ».

Et voilà l´histoire. Un groupe de 125 jeunes combattants, dont le frère de Fidel Raúl actuellement au pouvoir, avaient été torturés et la plupart assassinés par le régime de Fulgencio Batista dans ce bastion militaire à l’époque la deuxième plus importante forteresse de Cuba après le Quartier Général de Columbia à La Havane. La visite de cette caserne transformée aujourd´hui en école et en musée après la Révolution de 1959 fût très enrichissante.

Caridad del Cobre Basilika

Caridad del Cobre Basilika

Après la visite du cimetière, nous roulons 16 km de Santiago de Cuba. Sur une colline de Santiago del Prado, rebaptisé El Cobre (Le Cuivre), où a commencé l’exploitation de premières mines de cuivre à ciel ouvert découvertes par les Conquistadores est le premier lieu de Cuba où les esclaves conquirent leur liberté. En effet, les esclaves se révoltèrent pour la première fois à Cuba et obligèrent leurs maîtres à importé des Chinois et des Espagnols. Là sur une colline se dresse le clou de ma venue à Cuba : La Basilique de Virgen de la Caridad del Cobre elle est un haut lieu de pèlerinage pour les Cubains et le monde entier. Sacrée basilique en1977 par Paul VI, elle est la seule de tout le pays.

À la fin de la guerre d’indépendance nationale, le 10 mai 1916, Notre Dame de la Charité fut proclamée Patronne de Cuba par le Pape XV. Le 8 septembre 1927 s´inaugure son grand jour de célébration. À cette date arrivent des foules des quatre coins du monde pour déposer des offrandes et faire des vœux. En 1952, s´organisa une procession où elle fût portée de village en village dans tout Cuba.

Il paraît que lorsque les Espagnols étaient en danger, ils jetaient à la mer les objets sacrés pour que les pirates ne les profanent pas. Ainsi selon une une version, deux indiens et un noir en détresse perdus sur la mer en pleine tempête, virent flotter sur l’eau cette statue, avec l´inscription à sa base : « Je suis la Vierge de la Charité. » Et furent sauvés. Au mot Charité j´ai toujours préfèré Bienfaisance. Je sais que tout est bienfait mais je ne sais pas faire la charité. Pas du tout religieuse mais bien spirituelle, ayant toujours besoin de force et de courage, j´aime la Vierge qui symboliquement représente pour moi la Force Universelle. La Déesse de L´Univers. Je suis ravie d´être à El Cobre mais inquiète d´arriver au bus en retard.

« Sainte Vierge Marie, Vierge de la Charité ! Mère de Dieu, Mère des Miracles, merci de m´avoir guidé vers toi malgré tout ! Accorde moi ta lumière et ta grâce !» est ma prière.

Cuba est traditionnellement un pays catholique influencé par le syncrétisme dont la plus répandue, la Santéria, qui exige son chapître à elle seule. Après la révolution de 1959, Cuba devint officiellement athée. Les biens du clergé furent nationalisés. Depuis les années 1990, cette sanction s´est levée. La crise pousse de nombreux pauvres à se tourner vers la charité des Églises. En 1992, Fidel Castro renonça officiellement à l’athéisme. En janvier 1998, le pape Jean-Paul II a effectué une visite historique sur l'île, invitée par le gouvernement cubain et l'Église catholique.

La prière dela Vierge d´El Cobre :

Salut, salut, délice du Ciel,
Vierge pure, suprême beauté ;
Salut, excellente Patronne de Cuba,
Mère rayonnante de charité.

Quand les larmes étaient le pain de tes fils,
Et quand leur existence était une terrible angoisse,
Toi tu étais, O douce Mère, l’Etoile,
Qui a annonçé l’aurore de Paix. »

Et doucement nous arrivons à Camagüey dans les vastes plaines au milieu de Cuba, arrosées par deux rivières. Fondée le 2 février en 1514, cette ville de 305 845 habitants qui était la proie des pirates, s´appellait Santa María del Puerto de Príncipe. Nous habitions l´ »Hôtel Colon »dont l´architecture expose toute l´histoire de cette petite ville.

Nous déjeunons à Sancti Spíritus, la capitale de la province de Sancti Spíritus de 135 533 habitants classée « monument national ». L’économie de la région de Sancti Spíritus est caractérisée par des cultures de canne à sucre, de tabac et par l'élevage et la pêche. La vieille église au toit vert dont les origines remontent au xvie siècle est la plus ancienne église du pays.

Trinidad est une petite ville e 73 000 habitants, d´un pittoresque au charme pastel de la province de Sancti Spíritus est un centre historique à l'architecture coloniale inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 1988. Ses villas coloniales et ses anciennes demeures de toits en tuiles et les murs en pierres de taille, sont d´une beauté. Vous n'y trouverez trace de modernisme. Les habitants sont d´une gentillesse. Toutes les villes à Cuba que nous avont visité ainsi que les maisons sont d´une propreté exemplaires. Ce qui prouve que la pauvreté n´a rien à voir avec la saleté.

Fondée en 1514 par le conquistador espagnol Diego Velázquez de Cuéllar, Trinidad s´est prospérée grâce à la canne à sucre. La Plaza Mayor et la Casa de la Trova où nous nous sommes imprégnés de son et de mujito sont les places principales.

À 13 km de Trinidad, au village de Manacas nous nous sommes réjouis comme des enfants Malte et moi à grimper les 137 marches de la tour Iznaga de de 43,5 m de haut, érigée en 1816 par le négrier Alejo María del Carmen Iznaga, un riche sucrier.

Maria rencontre sa famille

Maria rencontre sa famille

Le lendemain Mona et nous prîmes le taxi avec Maria à la visite son oncle et sa famille au milieu des terres. Le bonheur de la famille à son arrivée est indescriptible. Son oncle, un joyeux centenaire n´en croyait pas ses yeux :

- Caramba ! Maria ! Comme je suis content ! Caramba ! Maria !

Santa Clara ! Santa Clara ! Petite ville de 207 963 habitants, nommée d´après Clara d´Assise, une disciple de Saint François d'Assise et fondatrice de l'Ordre des Pauvres Dames (Clarisses). Fondée en 1689 par les habitants de Remedios, elle devint célèbre pendant la révolution cubaine. En effet le 28 décembre 1958, accompagné de seulement 300 hommes, Ernesto Lynch alias El Commandante Che Guevara camarade du Commandant Fidel Castro, vainquit les 3 000 soldats de Batista qui la défendaient. Puis infligea une nouvelle défaite au dictateur en faisant dérailler un train militaire transportant 408 soldats et tout un arsenal d'armes, qui devaient bloquer la progression des rebelles. Les évènements s'achevèrent par l'encerclement des hommes de Batista qui prit la fuite. L´imposante statue en guerrier de El Che domine le mausolée qui abrite ses restes ainsi que ceux de ses compagnons de guerre.

Cette traversée quoique dénuée de véritable joie fût une expérience enrichissante qui m´a ramené à la Présence, à la Compassion. Je la glisse aux Archives pélerinage et ... Retraite révolutionnaire. Les guides nous emmènent à bon port. Je remercie Dieu en eux. Corrects, reconnaissants, nous leurs donnons un généreux pourboires. La guide Cubaine Leina elle, me remercie très amicalement. Le blond le reçoit allez savoir pourquoi, comme une corruption. Lui seul sait pourquoi. Je n´analyse plus. J´ai enfin laché prise. La colère a laissé la place à la tristesse qui elle vole comme un aigle au dessus de ma tête. Je ne la laisse pas faire son nid dans mes tresses. Dans un groupe, une famille ou une corporation, on choisit un bouc émissaire. Un Bouc émissaire est « un bouc que le prêtre, dans la religion hébraïque, le jour de la fête des Expiations, chargeait des péchés d'Israël c´est-à-dire Personne (ou ensemble de personnes) sur laquelle on fait retomber les torts des autres. » Rappeler vous que j´ai été choisi pour statuer l´exemple. Il n´est pas facile d´être un agneau noir. J´ai tenu bon. J´ai payé le prix matériellement, mentalement et psychiquement pour voir Cuba. Je jette l´éponge et compte les jours.

J´en ai assez de m´en vouloir d´avoir le courage de vivre, de ressentir, de réagir. Je renais de nouveau. Je conclus encore une fois que les gens sont malheureux et ne savent pas ce qu´ils font mais font ce qu´ils peuvent. Capter que ce n´est pas le temps qui est précieux mais l´au-delà du temps est une épreuve qui exige l´intelligence du cœur, tant de considération, cet introspection qui exige l´attention et une délicate intimité avec soi-même : La Présence. J´assumee choix de sillonner « Cuba Grande » avec Albatros qui a entraîné les conséquences de ces agaçants « Trois minutes ». Négresse Nordique, m´identifier intensément Créole, Guadeloupéenne, Martiniquaise, Seychelloise, Brésilienne, … Cubaine... me purge des préjugés injectés par la société dans laquelle je me démène.

Je pardonne à ce guide son attitude de supériorité comme je me pardonne de l´avoir juger, puisque sans ces cent-quatre-vingt secondes, je serais repartie aveugle de ce racisme à Cuba vécu parallèlement dans le peloton. Mon authentique révolution est ma re-création afin de m´unir à L´Esprit, ce souffle infini qui nous appartient à tous sans exception. Je commence là où je suis, ici et maintenant. Ainsi soit-il. Merci Notre de Dame d´El Cobre ! Merci, merci, merci !

Recueillie dans le mausolée d´Ernesto Lynch alias Che Guevara, entourée de ses photos, et ses objets de guerre, je m´imagine dans le rêve des milliers de jeunes fanatiques du Che qui dissertent encore : «Je ne suis pas un libérateur. Les libérateurs n'existent pas. Les gens se libèrent eux-mêmes. » sans capter l´essence de la liberté rime de vérité. Descendante d´esclave, j´ignore ce qu´est liberté en tant qu´être humain. Le seul manque de contrainte que je ressens est dans la méditation malheureusement gommé de ma routine vacancière puisque je me croyais au paradis. Grosse erreur en sachant que c´est un sacré souffle indescriptible qui pendant à peine un quart de seconde me rattache à tous et à tout. Sans exception. Même les racistes.

"Surtout, soyez toujours capables de ressentir au plus profond de votre coeur n'importe quelle injustice commise contre n'importe qui, où que ce soit dans le monde. C'est la plus belle qualité d'un révolutionnaire, disait Che. » Juste avant, de sa voix de journaliste en mission, le guide nous avait lu sa lettre à son ami Fidel, et aussi annoncé la déclaration de guerre mondiale de Putin en Ukraine. Un vent de peur s´était engoufré dans le car de luxe, suffoquant les retraités sauf Mona qui espiègle roucoulait Lilli Marlène. Moi. Zip ! Allez savoir pourquoi, je pensai à la Shoah. Une histoire que je connais mieux que celle de l´esclavage. Dans un flash me suis vue en « Anne Frank ». Shoah. Un corps de souffrance collectif aussi déchirant, susceptible, ténébreux et néfaste que l´esclavage, si on admet que seulement dans les colonies françaises, cette Traite Négrière, ce cruel génocide de douze millions d´invividus est aujourd´hui considéré un crime contre l’humanité, perpétré sous le couvert de ces médiocres lois signées entre autres par la Suède : le Code noir qui est un recueil d'une soixantaine d'articles promulgués en 1685 sous le règne de Louis XIV, et qui rassemble toutes les dispositions règlant la vie des esclaves noirs.

Des touristes Chinois fourmillent. Une jolie gardienne m´observe. Je me détache afin de m´observer au somptueux monument funéraire de El Che Guevara, l'idole des gauchistes et des étudiants universitaires de l'Ouest, du symbole des mouvements révolutionnaires marxistes du monde entier ainsi que l´icône de la lutte des pauvres et des opprimés contre l'impérialisme et le capitalisme. Sa popularité est encore due à ses sentences fulminatoires anti-consuméristes mémorables. Et pourtant, pourtant, sa célèbre photographie coiffée de son béret de guérillo communiste, est la plus commercialisée dans le monde entier. J´en ai ramené en coiffes, en sculptures, sur des tasses, des drapeaux, des T-shirt et des affiches pour mes jeunes amis.  J´étudie une très belle photo de lui en pied. Je vois une lueur morose dans les yeux d´ un beau jeune homme, timide, souriant et charmant, si fragile, brave, avide de justice, de liberté et d´être reconnu, dont personne ne se serait souvenu s´il n´avait pas été un guérillero. « Hasta Siempre Che Guevara », la ballade de Carlos Puebla entendue dans tous les concerts quotidiens durant ces quinze jours se fredonne en moi.

L´île Cayo de Santa Maria

L´île Cayo de Santa Maria

L´île Cayo de Santa Maria est isolée des Cubains et purement touristique. Un bracelet bleu vous donne le accès à tout. Les seuls Cubains sur l´île sont les employés des hôtels. La plupart des touristes qui sont Canadiens ne connaissent pas Cuba. Je me demande si après la traversée de « Cuba Grande » ma connaissance de cet île est meilleure que la leur. Ma réponse est que pour connaître et comprendre Cuba, il faut être Cubain ou Cubaine. Beaucoup de Cubains sur mon chemin s´amusaient en riant aux éclats à me faire articuler :
-Soy cubana, soy popular !
"Hasta Siempre Che Guevara", la ballade de Carlos Puebla que j'ai entendue dans tous les concerts quotidiens durant ces quinze jours bourdonne en moi.

Aprendimos a quererte,
Desde la histórica altura,
Donde el sol de tu bravura
Le puso cerco a la muerte.

 

Refrain :

Aquí se queda la clara,
La entrañable transparencia
De tu querida presencia,
Comandante Che Guevara.

 

Tu mano gloriosa y fuerte
sobre la historia dispara,
cuando todo Santa Clara
Se despierta para verte.

 

Refrain :

Vienes quemando la brisa
con soles de primavera
para plantar la bandera
con la luz de tu sonrisa

 

Refrain :

Tu amor revolucionario
te conduce a nueva empresa,
donde esperan la firmeza
de tu brazo libertario.


Stockholm 11 mars 2014
Maxette Olsson


Sources:

- Alba, Luis. 'Tracing the Origins of Salsa Music.' History of Salsa and other Latin dances (2002)

- Noirs, Blancs, Métis : où en est Cuba ?

- Cuba raciste? Non, mais…

- STUDY IN CUBA Top universities

- Comment fonctionne l’éducation à Cuba ?

- Wifredo Lam

- Ronaldo Mendes Las Bestias

- Pas facile d'être noir ou métis à Cuba

- Cuba : les barrières raciales pour les Métis et les Noirs restent un sujet tabou

- Sverige krävs på pengar för slaveri

- 32 piskrapp vid quatre piquets -Svensk rättvisa och slavlagar på Saint Barthélemy

- Avundsjukan har urgamla anor