Entretien et portrait par Lise-Marie Ranner-Luxin
Femme debout au milieu des Fjords, Négresse nordique comme elle aime se définir, Maxette Olsson est la meilleure ambassadrice de la culture antillaise au delà des mers. Son rire, son naturel, sa générosité, sa joie de vivre communicative et ses tenues créoles colorées en ont fait l’une des personnalités les plus populaires et appréciées du pays. Bien que la Suède soit son pays d’adoption puisqu’elle y vit depuis plus de trente ans, son cœur est resté à Saint-Claude en Guadeloupe, car toutes ces années passées à l’étranger ne lui ont pas fait perdre son âme profondément créole.
Femme voyageuse, quittant son île natale à l’âge de seize ans, Maxette Olsson n’a de cesse l’affirmation de son identité. En 1970, elle décide de partir en Afrique et découvre le Congo-Brazza, l’Angola, le Gabon, la Côte d’Ivoire et Fort-Lamy aujourd’hui N’Djamena. Ce voyage initiatique va l’aider à accepter pleinement son origine et être en accord avec elle. Après avoir vécu quatre ans en Belgique où elle coache son fiancé champion de boxe belge Freddy De Kerpel, elle émigre en Suède pour l´amour d´un champion de ski. Tout de suite, elle est happée par l’histoire et la culture de ce pays et s’investit dans l’apprentissage de la littérature et de la mythologie suédoise.
Femme battante, ce sont deux boutiques de mode importées de Paris quelques années plus tard : « Boutique Maxette », qui deviennent des points de rencontres culturelles. Maxette Olsson organise plusieurs défilés caritatifs au profit de la Croix rouge, et Sauver les Enfants.
Femme d’échanges désirant partager son savoir, elle donne des cours de pensées positives et de français à Medborgarskolan et des conférences sur les traditions créoles dans les écoles. Le créole est sa langue maternelle, et fait partie de son ADN. Inspirée par l’œuvre de l´écrivain martiniquais Raphaël Confiant, et spirituellement conseillée par l’avocate-journaliste Gérard Dorwling-Carter, elle met à profit ses études avec les linguistes Karl Gadelii et Michaël Parkvall à l’université de Stockholm et décide d’écrire en créole.
Femme de culture, Maxette Olsson à plusieurs arts à son arc. Passionnée d’art elle a dirigé à Stockholm, la « Galerie Étage » et en 1993, son ouvrage “Kaj-Ficaja, le Cerveau Volant à la conquête de l´espace” de la Collection Passeport édité par Fragments est un succès de vente.
Femme amoureuse Maxette Olsson part aussi vivre quatre ans à Boston en 1998 avec son époux Malte, ingénieur et champion d’échecs, et fait du stand up à The Comedy Studio à Harvard.
Femme spirituelle en 2004, Maxette Olsson, propose à l’artiste Dalgmar Glemme, allemande, suédoise dont elle est la muse, de peindre le tableau de La Vierge Noire, de la chapelle de la Résurrection de Terreville à Schœlcher en Martinique.
Femme égérie, la multinationale suédoise IKEA fait appel à elle en 2006 pour illustrer leur campagne publicitaire et les réalisateurs Stéphanie et Steve JAMES dans “F COMME FEMME diaspora”, la choisissent pour inaugurer leur série de documentaires diffusée sur France O. Dans l’album GWADA-KA La Femme Antillaise, elle est mise à l’honneur.
Femme de cœur, elle accepte d’animer en 2009 le festival créole de Menton, créé par l’écrivain Marie-Reine de Jaham. Reconnue comme l’une des 50 personnalités les plus populaires en Suède, son histoire est illustrée dans le livre de la célèbre photographe Ewa Rudling : Romantiken i mitt liv Éditions BEIJBOM.
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ENTRETIEN :
FAM : Quel est l’accueil des Suédois quand ils vous voient arriver dans votre costume traditionnel créole ?
Maxette Olsson : Ils sont ravis et enchantés par mes coiffes créoles, mes jupons et ces couleurs qui caractérisent le costume créole. En hiver, je me contente de châle ou de bandeau en madras. Ils me demandent d’où je viens et là je sors mes tirades d’Ambassadrice de la Créolité en Suède. Je leur parle de la langue créole, de la Guadeloupe, de la Martinique, de Saint-Barthélemy, qui a été un moment dirigé par les Suédois, un morceau de leur histoire que la plupart ne connaissent pas et des îles Caraïbes. Je me réjouis d’être Créole et mon esprit est Créole aussi je leur transmets ma joie. Être Créole signifie pour moi tout simplement être.
FAM : La communauté antillaise de Suède est-elle importante et organisée ?*
Maxette Olsson : Nous ne sommes pas du tout nombreux mais j’aime à croire que nous sommes de qualité en compensation (rire). Nous sommes une cinquantaine de Guadeloupéens et Martiniquais dans toute la Suède. À Stockholm où j´habite, j’en connais une dizaine. Par contre, il y a un peu plus d´Haïtiens que j’inclus dans mon petit groupe lors de mes fêtes créoles.
FAM : Comment avez-vous été choisie pour la Campagne d’IKEA ?
Maxette Olsson : C’est la célèbre reine de Salsa Maria Llerena de Cuba, qui en voyant le personnage du script, qui était une femme excentrique, m´a recommandée car elle-même était déjà engagée ailleurs. L’agence m´a téléphoné et m’a demandé de passer une audition après une centaine de personnes. Et j´ai obtenu le rôle qui me convenait à merveille car c’est une femme qui parle de sa garde-robe, de sa cuisine, de ses fêtes, du confort de son lit dans une série de films publicitaires comiques qui ont eu un énorme succès, d´autant plus que j´étais la première noire vedette d’IKEA. Ce qui était très bien, c’est que pour la cuisine ils ont accepté que je sois en costume créole et pour les lits, j’ai pu garder mes bandeaux en madras. Et puis, animatrice et comique, j’étais toute contente car mon rêve était de faire rire toute la Suède. C´est fait car du coup j´étais partout, sur toutes les chaînes télévisées. Aujourd´hui je suis très connue comme « La femme IKEA », ce qui m´amuse car tout le monde sourit rien qu´à mon apparition (rire). J´aime donner de la joie. C´est plus fort que moi. Ma joie est une tristesse dénudée. Mon mari Malte Olsson dit que je suis 99 % du temps joyeuse, mais 1 % c´est 1 % (rire).
FAM : Vous revenez de voyage, où puisez-vous cette énergie pour accomplir toutes ces activités ?
Maxette Olsson : Je puise mon énergie dans la méditation, la prière, le recueil et le sondage constant de mon intention. Mon intention pour le moment est de vous faire sourire (rire). J’aime le bel esprit des gens. Et nous avons tous sans exception un bel esprit. Même si parfois je déraille, je travaille presque tout le temps à m’adresser à l’esprit de l’être. C’est une sacrée mission car nous ne sommes pas tous conscients de cette partie de nous.
FAM : On vous surnomme le Soleil de la Suède et là bas en hiver il n’y a pas de jour, le soleil des Antilles ne vous manque-t-il pas à cette période de l’année ?
Maxette Olsson : Voyez-vous, je suis un pur produit de la diaspora, une vraie immigrante c’est-à-dire que j’immigre constamment en moi-même. J’ai jusqu’ici choisi de propager le meilleur esprit des pays qui m’ont éduquée. De la France, j’ai gardé le cérémonial de la cour, l’amour des belles lettres littéralement, la magie de la représentation de la parole et de la pensée qu’est l´écriture, la littérature, l’art et puis la coquetterie… De la Suède ? Je recueille la quiddité de l’organisation, le respect de la ponctualité, le sens du travail quotidien qui régénère la liberté de se métamorphoser, la puissance du silence et la sainteté de la solitude. Des Antilles, j’ai hérité la joie divine qui n’a pas son contraire, cette jubilation malgré tout, la simplicité sophistiquée, la créativité du débwouya-pa-péché, les belles manières créoles des fanm tonbé pa janmen dézespéré, de la cour qui ne dort pas, la serviabilité, le courage, la force, la foi, la volonté dont le moteur est la décision, la fierté… “Semper pulcher esto” “La fierté d´abord” est la devise de l’emblème de ma famille maternelle : Beaugendre.
Pour répondre à votre question, il y a trente-trois ans, à mes débuts en Suède, j’ai vécu tout au nord de la Suède près de la Laponie avec mon conjoint qui était champion de ski. Ce jour d’hiver, la température était – 50 degrés. Oui ! -50 degrés. L’air était de glace et il fallait sortir prendre l’air. En chemin, je me suis volontairement perdue dans ce brouillard glacé, me suis mise à genoux et j’ai demandé en pleurant à Dieu que j’avais éliminé de ma vie : « Moi, une fille du soleil, pourquoi suis-je ici ? » J’entendis une voix, qui n’était pas une voix, me dire: « Pour que tu apprennes que le soleil est dans ton cœur. » Au fil du temps, j´ai compris le message. Depuis, je suis bien où que je sois dans mes voyages qui ne se font pas sans mon mari bien aimé qui est champion d´échecs, l´homme qui m´encourage et me soutient dans tous mes projets.
FAM : Votre message à toutes les femmes d’Outre-mer au delà des mers ?
Maxette Olsson : À toutes les femmes d Outre-mer au delà des mers, je dis : La Femme est une Force qui accouche l’Univers. Quel que soit comment nous voyons les choses, nos occupations ou nos pensées, nous sommes tous dans la même lumière, aussi, vivons ce moment présent avec passion et tenons bon ensemble ! Je vous aime tous ! Merci tout simplement d’être où que vous soyez ! Merci à vous TOUS !
Juin 2010