Femmes créoles avec AMINA LE MAGAZINE DE LA FEMME
Maxette Olsson
Née à Saint-Claude en Guadeloupe, et résidant en Suède Maxette Olsson rien perdu de son âme nègre. Levant hardiment le point pour la reconnaissance de son identité, elle a eu l’occasion de s’offrir un voyage en Afrique dans les années 70.
Votre combat ne date pas d’aujourd’hui, n’est-ce pas ?
C’est vrai ma prise de conscience, je la dois à Gérard Lauriette, le premier à oser enseigner en créole au collège Campenon.
Ma levée de boucliers en ce qui concerne l’interdiction de parler créole et ma manie de tout remettre en question m’ont fait échouer en France en 1966, au lycée Stéphane Mallarmé. En 1967, après avoir accouché de mon fils Franck, j’ai travaillé aux Parfums Jean Desprez mais, puisque les hippies allaient en Inde à la recherche de "Peace and Love", je suis partie à la recherche de l’Afrique en 1970-71. J’ai découvert le Congo-Brazza, Angola, le Gabon, La Côte d’Ivoire et Fort-Lamy aujourd’hui N’Djamena. Accepter pleinement mon origine m’a permis de mieux me connaître moi-même.
En Europe, vous avez continué la lutte ?
À mon retour d’Afrique, j’ai vécu quelques années en Belgique à Gand, ou j’étais fiancée au champion de boxe belge, Freddy De Kerpel. Puis en 1976 j’ai rencontré un Suédois qui ne voulait pas déménager en France, avec lequel j’ai cohabité en union libre six années. Après avoir étudié la littérature suédoise, j’ai été la première femme noire à ouvrir sa boutique de mode à Sundsvall, au Nord de la Suède. Pendant douze ans, j’ai importé des vêtements de Paris.
Parallèlement je donnais des cours de conversations positives en français aux retraités, c’est à- dire que nous n’abordions que des sujets plaisants. J’allais dans les hôpitaux écouter les vieux qui me racontaient l’histoire du pays. J’ai été élevée entre autres par ma grand-mère qui elle, s’occupait des vieilles personnes. C’est une bonne instruction ! J’allais aussi dans les écoles d’handicapés parler de la Guadeloupe qui n’était pas sur la carte. En costume créole j’apprenais à danser la biguine à la maternelle. J’organisais des salons de discussions, des expositions d’art, des concerts de gospel des collections de mode... Je travaillais le plus souvent bénévolement au profit d’associations humanitaires comme la Croix- Rouge et "Sauver les Enfants".
Les Suédois du nord sont des bosseurs consciencieux et disciplinés, aussi ils ne respectent pas les gens qui ne travaillent pas, mais ils ne vous emploient pas. "Man ska göra rätt för sig”, ce qui veut dire: "Pour avoir son droit, il faut travailler”. Je travaillais jour et nuit jusqu à épuisement ce qui m’a séparée de mon ex et paralysée un mois mais il fallait passer par là.
Puis vous vous êtes reconvertie dans les arts ?
En 1989, j’ai emménagé à Stockholm où du jour au lendemain tout en dirigeant une galerie d’art, la Galerie Etage, je me suis reconvertie en écrivain, métier qui m’attirait mais dont je pensait qu’il fallait être riche pour l’exercer. Malté, mon époux m’a encouragée dans cette voie. Ses parents sont des artistes peintres qui valorisent la création. Sa mère Karin Olsson est une célèbre paysagiste en Suède. Son père KG, Olsson était professeur de dessin. Aujourd’hui j’écris de tout mon soûl, j’ai signé un Livre d’art vite épuisé : “ Un cerveau volant à la conquête de l’espace" aux éditions Fragment. J’y parle de KajFicaja, un couple de peintres et sculpteurs avant-gardistes avec lesquels je travaille depuis trente ans. J ‘écris des contes, des articles, des histoires, et des lettres en créole, en français, et en suédois. Je suis en train de terminer” Dieu est maître-femme créole “un roman qui m’apprend à écrire car comme le rappelle le maître de la créolité, mon mentor virtuel Raphaël Confiant tout est déjà écrit dans un style idéal. Ce livre non publié m’instruit, m’ennoblit, m’élève, et me dynamise. Allez comprendre !
Ecrire est une passion dévorante ?
J ‘aime tant écrire, surtout des lettres, que j’ai toujours cette impression de ne rien faire. Cette occupation m’enrichit et j’espère la mener le mieux possible. J’écris souvent pour écouter le sacré du silence entre les mots, mais j’y parviens mieux dans la méditation ou le recueillement. Je fais aussi du théâtre. Durant mon séjour à Boston, j’ai pris des cours de théâtre et de littérature afro-américaine. Je me suis produite au Comedy Studio à Harvard et de temps à autres, je suis sur scène pour les fêtes d’entreprises en Suède. Je suis aussi poétesse car la poésie est pour moi la mélodie de la littérature une expression sacrée. Mon état de poétesse est obligatoirement et authentiquement nègre grâce à Gérard Lauriette, Frantz Fanon et Aimé Césaire. Je les lisais pleine de gratitude d’être née négresse qui rime avec tresse, finesse, caresse, allégresse, noblesse, déesse…
Joël Sandot (08/08)